Je vais vous parler aujourd’hui d’une mode que d’une part je trouve à chier et que d’autre part je hais au plus profond de moi. Je vais vous parler des bonus cachés des DVD.
Il était une fois le DVD. Le DVD était un nouveau format de disque optique, dont la plus grande carrière était promise dans le domaine de la vidéo. Auparavant, les gens achetaient, ou plutôt n’achetaient pas de films en vidéo. Il faut dire qu’ils étaient vendus en cassettes VHS : la vidéo était de piètre qualité et la plupart des gens n’avaient que des magnétoscopes bas de gamme mono et mal branchés, ce qui ne faisait qu’aggraver la qualité de l’image car les cassettes étaient protégées contre la copie. Ça ne gênait pas les gens puisque de toute façon ils ne les achetaient pas… les gens préféraient enregistrer les films à la télé et découpaient les jaquettes dans TéléK7.
Et donc vint le DVD. Parmi toutes les promesses de ce nouveau format, il y avait entre autre celles d’une qualité d’image excellente, la possibilité d’avoir plusieurs langues et sous-titres sur le même disque, la possibilité de revoir 100 fois le même film sans abîmer la bande (problème qui a niqué le marché de la location sur VHS), pas la peine de rembobiner, une optimisation pour les téléviseurs 16/9ème qui commençaient à se vendre, des tas de bonus… et, bien sûr, une interface interactive.
L’interactivité est un concept simple, qui consiste à donner à l’utilisateur la possibilité d’intéragir avec l’objet/le produit/la machine qu’il est en train d’utiliser. Autrement dit, dans le cas qui nous intéresse, l’utilisateur peut participer activement au déroulement du programme. Avec les VHS, l’interactivité se limitait à PAUSE, PLAY, STOP, FAST FORWARD et REWIND (il est à noter qu’avec les VHS, PLAY et REWIND étaient déjà automatisés). L’interactivité est dans ce cas très basique, mais l’utilisateur est déjà maître de ce qu’il peut voir. Un contre-exemple d’interactivité est par exemple une machine à laver le linge, où l’utilisateur fixe un programme au départ et ne fait plus rien jusqu’à la fin (ou alors il n’a plus qu’à refaire une machine).
À ce stade de mon exposé, il est à noter que le DVD a aussi la désagréable possibilité de SUPPRIMER l’interactivité. C’est le cas de la plupart des messages anti-copie, logos d’éditeurs et pubs quelconque avant programme. J’y reviendrai ultérieurement, mais je considère ceci non seulement comme un retour en arrière inconcevable ainsi que d’un pur scandale vu l’argent que les consommateurs dépensent dans l’achat de DVD.
L’interactivité dans les DVD a été poussée jusqu’à une limite jamais atteinte dans un produit audio-visuel grand public. Dans certains cas on peut même programmer de mini-jeu vidéos (le jeu vidéo étant le summum de l’interactivité). La première idée qui vint donc aux Grands Designers du DVD fût une des plus connes jamais sortie de leurs cerveaux minables : faire des menus du DVD un mini-jeu dans lequel le spectateur s’amuse à trouver par quel moyen tordu il faut lancer le film dans la bonne langue. Le DVD de Dark City est un flagrant exemple de la stupidité de ces merveilleux Créateurs d’Amusement Interactif.
Le menu principal de Dark City. Où voulez-vous aller ?
Bien entendu, les DVD français sont pour la plupart bridés au niveau du changement de langue et de sous-titre en cours de lecture du film, ce qui ajoute un peu de piment à l’aventure : pour regarder le film en VOST, il faut impérativement trouver le menu « langues » et le menu « sous-titres » (il se peut que le Designer d’Interactivité ait séparé les deux). Dans le cas de Dark City, il y a tout de même un petit point « info » qui nous renseigne de la façon suivante : « Le Guide Shell Beach est disponible dans la salle de bains de l’hôtel ». Jouer à Silent Hill pour avoir le droit de voir le film que vous venez d’acheter ? Vous n’en avez pas rêvé, et pourtant nos Merveilleux Designers l’ont fait.
Ensuite, la trouvaille suivante de nos chers Intellectuels du Plaisir de la Télécommande fut…
…le BONUS CACHÉ.
Les DVD avaient, et ont toujours, une capacité de stockage telle qu’il est possible d’inclure, à côté du film ou sur un second DVD (pour les éditions collector) des bonus tels que making-ofs, films annonce, commentaires audio du réalisateur pendant le film, etc. Une édition DVD avec un minimum voire pas de bonus est considérée comme bas de gamme, ce qui fait que d’une part la plupart des bonus sont nuls à chier car les éditeurs n’ont pas la thune pour en faire, et que d’autre part les rééditions d’excellents films un peu anciens sont sans bonus mais à 20€ tout de même… et du coup personne ne les achète. Du point de vue marketing, la simple présence de bonus (bons ou mauvais) est au moins aussi importante que le film lui-même (et c’est d’ailleurs pour cette raison que plus personne n’achète de CD audio : il n’y a pas de bonus).
Je ne sais pas lequel de ces Individus Hautement Intelligent eu en premier l’idée du BONUS CACHÉ. Ce que je sais, c’est que si un jour je le rencontre il mangera un certain nombre de mes DVD vidéo (collector ou pas) et aura un spindle de 100 DVD-R dans le cul (pour la forme).
Le concept est le suivant : on a un film sur le DVD. On a des bonus. Que manque-t-il ? Et bien maintenant, les menus à la Zelda ont disparu car les utilisateurs en avaient marre. Pour compenser, on va donc profiter de la grande interactivité du DVD pour cacher des choses que l’utilisateur veut voir. Celui-ci devra se plier à un examen des tous les menus de tous les disques pour trouver un bonus marrant qu’il ne faut absolument pas manquer de voir. Mais ce bonus est CACHÉ. C’est DRÔLE et AMUSANT, vous ne trouvez pas ?
Entendons nous, bien, il y a bonus caché et bonus caché. Dans le genre « caché pour faire genre », il y a les bonus qu’on ne peut pas rater puisqu’ils sont « planqués » entre le dernier item d’un menu et le bouton « retour » : avec une télécommande, on est obligé de passer dessus à un moment où à un autre et si le bonus caché se trouve à la fin de la liste des bonus normaux, ça fait une bonne surprise au moment de revenir au menu principal car on se rend compte qu’on en a encore à regarder.
Les bonus cachés que je vomis, ce sont ceux qu’on rencontre malheureusement partout : celui dont le bouton caché est dans un coin de la quatrième page des chapitres (là où personne ne va jamais – Le Seigneur des Anneaux), celui qui n’apparaît que pendant 5 secondes à la fin de la boucle vidéo du menu qui dure une minute (Les Indestructibles), celui qui se déclenche quand on appuie sur un bouton pendant une transition de menu ou même pendant le film… La liste est quasiment infinie.
Les Indestructibles : 12 bonus cachés au milieu de dizaines de menus !
Il faut attendre l’apparition du robot en haut sur certains d’entre eux.
20 secondes d’attente à chaque fois, parfois 40 quand il y a deux robots par menu.
En général, quand je donne mon avis sur ce genre de torture mentale imposée par un connard prétentieux derrière son logiciel d’authoring, on me répond « oui mais c’est marrant, tu découvres ça par hasard ». Ben non, je découvre pas ça par hasard. J’ai déjà peu de temps pour regarder 2h de film et 1h de bonus (sans compter les commentaires audio), c’est pas pour en plus ausculter tous ces fucking menus de merde dont l’utilitée est juste de guider le spectateur dans le contenu du DVD. Quand j’achète un produit, que je sache la seule chose qui peut être cachée c’est justement le vice caché. Le bonus caché c’est un peu l’inverse du vice caché, c’est à dire que les gens aiment bien quand il y en a (même s’ils ne les voient jamais). Mais pour moi, c’est quand même du vice… bon sang, mais sur les jaquettes il est même inscrit « INCLUS : BONUS CACHÉ » ! C’est pas du sadisme, ça ?
Les Indestructibles en « chaussettes »
Saurez vous retrouver ce bonus deux mois après l’avoir vu ?
Et pour étayer un peu plus mon propos et m’appuyer sur mon propre texte, imaginons que puisque les gens aiment ça, on applique le principe du bonus caché à d’autres produits… par exemple une voiture. Malgré la hausse inévitable du pétrole, vous achetez une belle bagnole à zmille euros, avec tant de chevaux, tant de litres au cents, etc. Et avec des BONUS CACHÉS. Au moment de la livraison, vous entrez dans votre voiture, vous mettez le contact, vous démarrez, tout va bien. Arrivé chez vous, vous voulez faire un créneau… Sauf qu’il n’y a pas de marche arrière. Le voilà, le bonus caché ! Oh qu’il est drôle et amusant ! Après avoir actionné le levier de vitesse dans tous les sens, vous laissez tomber et revenez chez le concessionnaire qui avoue ne pas en savoir plus que vous, mais il vous recommande de jeter un œil sur le mode d’emploi (car toutes les voitures ont un mode d’emploi, je vous le rappelle). Bien entendu il n’y a rien, et au final c’est grâce à Google que vous découvrirez au détour d’un forum que pour faire une marche arrière il suffit de passer la première, mettre les warnings, attendre une minute et dès qu’une lumière verte s’allume sur le tableau de bord, il faut klaxonner pour engager la marche arrière.
Mais finalement après plusieurs années, vous aimez bien cette voiture qui vous donne toute satisfaction… vous l’utilisez pour partir en vacances, déménager, faire vos courses et aller au travail, et c’est un vrai bonheur (mais pas pour les créneaux). Un jour cependant, au bout de dix ans d’utilisation, le pot d’échappement fait un drôle de bruit. Vous décidez d’y jeter un petit coup d’œil. Zou, vous voilà sous la voiture… et là, vous remarquez un petit bouton à côté du pot. Vous appuyez dessus, et à ce moment là un grand « clac-boum ! » se produit au-dessus de vous. Inquiet, vous sortez de dessous là voiture et ouvrez le coffre, et surprise ! Celui-ci est devenu deux fois plus grand. Le voilà, le second bonus caché ! Oh qu’il est drôle et amusant ! LOL ! Tout le monde rigole avec les bonus cachés !
Je hais les bonus cachés.
Et vous savez quoi, j’ai une autre bonne raison pour ça. C’est que je possède des DVD dans lesquels je n’ai jamais trouvé comment accéder aux bonus cachés ou que je ne l’ai jamais fait par manque de temps. Par exemple sur Message à caractère informatif, il est indiqué, de façon claire et provocante : « rendez-vous sur le site officiel pour trouver le bonus caché ! ». Devinez quoi ? Et bien il n’y a jamais rien eu sur le site officiel. Oui, je sais, il y a des sites spécialisés pour les bonus cachés. Et vous savez quoi ? JE M’EN TAPE ! J’AI PAS BESOIN D’INTERNET POUR REGARDER UN DVD !
Aujourd’hui, je ne cherche même plus. Les bonus cachés ne m’ont jamais amusé et ne m’amuseront jamais. Je décrypte les DVD sur mon disque dur puis je lis mes DVD sur PC avec PowerDVD, de cette façon j’ai accès à toutes les séquences vidéo du disque en direct (par le menu « Title »). Cette manipulation me permet au passage de dézoner le disque, de supprimer les bridages d’interactivité et d’en faire des copies pour les amis, et ce par pure vengeance envers ces salopards (le soft est gratuit et s’appelle DVDShrink).
Mais lorsque je regarde ces DVD avec des amis, la seule chose que je peux dire c’est « il y a un bonus caché incroyable et super drôle, mais vous ne le verrez pas car il est caché ».
Encore une victoire écrasante de la stupidité humaine.
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